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Communiqué de presse

Bien caractériser l'infiniment petit pour contribuer à un développement responsable des nanotechnologies

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Nicolas Feltin, expert au LNE
Nicolas Feltin, expert en nanométrologie au LNE

L’essor des nanomatériaux

 

Si les nanoparticules existent à l’état naturel depuis toujours elles représentent aujourd’hui une réelle source de ruptures technologiques dont l’usage concerne une multitude de domaines : de l’énergie à la santé, en passant par l’alimentation, l’informatique ou les transports. Selon l’inventaire réalisé dans le cadre de l’initiative Project on Emerging Nanotechnologies, les nanomatériaux étaient ainsi déjà présents dans plus de 1 300 produits commerciaux en 2011.

 

C’est parce qu’elles offrent aux industriels de nouvelles propriétés (optiques, électriques, magnétiques) qui n’apparaissent qu’à  l’échelle nanométrique que les nanoparticules sont si présentes dans nos produits de tous les jours. Elles peuvent, par exemple, permettre de diminuer les quantités d’additifs utilisés ou encore d’améliorer les performances de produits.

 

Des définitions multiples, source de confusion

 

Alors que la définition d’une nanoparticule fait consensus au niveau international («matériau dont les trois dimensions caractéristiques externes sont à  la nano-échelle», à savoir compris «entre 1 et 100 nm», ISO), la notion de nanomatériau proposée dans le champ réglementaire fait en revanche débat. En effet différentes définitions des nanomatériaux co-existent aujourd’hui en Europe avec des particularités selon le secteur industriel concerné. La recommandation de définition 2011/696/UE (retenue pour les réglementations européennes sur les biocides ou les dispositifs médicaux, et pour la déclaration obligatoire française R-Nano) inclut ainsi un seuil en termes de proportion en nombre de nanoparticules présentes dans la substance, alors que les réglementations Cosmétique et Alimentaire n’en considèrent aucun. Une harmonisation par la Commission Européenne de ce que l’on entend par nanomatériau est attendue pour 2018 afin de clarifier la situation.

 

Démontrer le caractère nano d’une substance reste un défi de mesure

 

La détermination du caractère nano d’une substance au sens de la Recommandation de définition européenne nécessite de mesurer la taille de l’ensemble des particules primaires présentes dans la substance, qu’elles soient isolées ou regroupées en amas. Il est alors possible de connaître précisément la proportion de particules dont la taille est inférieure à  100 nm. De nombreuses techniques d’analyse permettent d’accéder à  cette information, mais aucun instrument n’est cependant parfait. Des résultats nettement différents peuvent ainsi être obtenus en fonction de la technique utilisée, chacune ayant des limitations qui lui sont propres, notamment en termes de sensibilité ou de confusion entre un amas de nanoparticules et une particule primaire de plus de 100 nm. La démarche recommandée aujourd’hui pour fiabiliser l’information recherchée est de croiser les résultats obtenus via plusieurs des techniques analytiques disponibles, la microscopie électronique à  balayage (MEB) restant néanmoins la technique de référence dans la communauté scientifique internationale en cas de doute. Une forte expertise sur la préparation d’échantillon et l’exploitation des images obtenues est cependant nécessaire pour en extraire des résultats de qualité.

 

La caractérisation, vecteur d’une innovation responsable

 

Le marché gigantesque que représentent les nanomatériaux nécessite de pouvoir maîtriser les performances des produits utilisant ces substances et d’évaluer le rapport bénéfice/risque correspondant, mais également de connaître plus précisément leurs applications dans les produits de consommation courante. Plusieurs ministères ont ainsi récemment rappelé aux industriels leurs obligations de transparence et d’étiquetage sur la présence de nanomatériaux manufacturés dans les produits de consommation. La mise en place d’un contrôle qualité adapté, notamment pour les matières premières utilisées, avec en parallèle une évaluation des risques potentiels associés s’avère ainsi indispensable. La question d’une caractérisation fiable des nanomatériaux et de leurs propriétés apparaît centrale à  ces différentes problématiques.

 

Le simple fait de définir une nanoparticule reste néanmoins une donne complexe prenant en compte de très nombreux paramètres comme la taille, la distribution de tailles, la composition, la structure cristallographique, la solubilité (ISO TR13014 :2012). Autant de données qui mettent bien en évidence la nécessité de disposer d’outils fiables pour un meilleur contrôle des processus de fabrication, une amélioration des systèmes qualité, la mise en place de contrôles réglementaires indiscutables et une juste évaluation des risques, à la fois en terme d’exposition aux nanomatériaux, mais également du point de vue de la caractérisation de leur danger potentiel (toxicité).

 

Une meilleure caractérisation des nanoparticules permettra de clarifier le débat et d’accompagner l’évolution de ce marché. Car si l’innocuité des nanoparticules dans l’alimentation et la cosmétique reste encore une question à éclaircir, les nanomatériaux et les nanodispositifs constituent néanmoins une réelle source de progrès dans de nombreux domaines tels que le médical (nanomédicaments) ou dans l’industrie énergétique (nanomatériaux pour le stockage de l’énergie).

Nicolas FELTIN

Chercheur – Expert en nanométrologie au LNE